Sur les pas du Messie : Joseph… (Partie 2)

Arrêtons-nous un instant et tentons d’imaginer un peu l’état d’esprit de ces hommes et de ces femmes qui se sont attachés à transmettre fidèlement les histoires qu’ils avaient eux-mêmes reçues de leurs pères. Se peut-il qu’ils aient eu conscience de ce qui était important et de ce qui l’était moins, faisant ainsi le choix de s’attarder sur tel récit plutôt que sur un autre ? Voyaient-ils déjà la résonnance prophétique de tels ou tels détails rapportés dans l’histoire de l’un ou de l’autre des patriarches ?

Les rabbins qui ont compilé ce que l’on appelle le Tanakh[1] (les livres de la Bible juive) avaient au moins un critère déterminant pour retenir un texte plutôt qu’un autre. Ce dernier devait, d’une manière ou d’une autre, annoncer au lecteur la venue du Messie. Pour nous, lecteurs de la Bible au XXIe siècle, il ne fait aucun doute que l’Éternel gardait, à chaque étape, la maîtrise des choix pour une fidèle transmission du récit biblique.

Dans la Torah, Béréchit se distingue notamment par une narration qui ne fait pas l’économie de ce qui pourrait apparaître comme un défaut ou une faute morale chez l’un ou l’autre des patriarches. Cette indication est même de nature à démontrer la sincérité de l’auteur et l’authenticité du récit.

S’agissant de la vie de Joseph, nous avons déjà eu l’occasion de nous demander comment Dieu avait pu « rebondir » sur les échecs successifs des patriarches, de Jacob, de ses fils et même de Joseph.

Si la personnalité singulière du jeune homme est parfois critiquée, ses rêves le sont beaucoup moins. Il est probable que dans le contexte de cette époque, les rêves étaient considérés comme un moyen fréquent donné par Dieu pour communiquer toutes sortes de messages. Joseph en était-il conscient ? Même si pour l’heure, tout semble lui échapper, pour nous lecteurs, il ne fait aucun doute que Dieu a inspiré ses songes d’une nuit d’été.

À ce stade, nous comprenons que les aventures prophétiques et messianiques de Joseph ne se déroulent pas selon un schéma qu’il a lui-même construit. Bien plus, s’il suppose ses rêves comme de nature prophétique, il n’en découvre — partiellement — la portée que bien des années plus tard. À la différence des prophètes d’antan, il est davantage un acteur obligé qui incarne le message prophétique en étant le prototype du Messie annoncé ; un peu comme une doublure dans une cascade au cinéma. Il n’est pas l’acteur dont le nom s’affiche au générique, mais il en est la figure, le reflet. À travers lui, nous distinguons celui que l’on « doit » voir in fine à l’écran.

La suite du récit que nous abordons à présent est un épisode particulièrement cruel et que, peut-être, certains auraient voulu pouvoir occulter. Pour nous qui avons le recul et la connaissance de la suite de l’histoire, nous savons bien que dans quelques chapitres, les choses finiront par s’arranger. Cependant, la prophétie messianique perceptible en filigrane de notre texte nous amène plus loin et pour une issue imprécise et encore à venir.

En attendant, la haine et le projet criminel des frères de Joseph ne s’en trouvent pas atténués.

Genèse 37. 18-35

18 Ils l’aperçurent de loin ; et, avant qu’il fût près d’eux, ils complotèrent de le faire mourir. 19 Ils se dirent l’un à l’autre : « Voici venir l’homme aux songes. 20 Or çà, venez, tuons-le, jetons-le dans quelque citerne, puis nous dirons qu’une bête féroce l’a dévoré. Nous verrons alors ce qui adviendra de ses rêves ! »

Quoi que l’on puisse penser du petit frère — l’enfant gâté de son père — il semble difficile d’imaginer les frères se mettre d’accord et établir un plan collectif visant la mort du jeune garçon aux allures naïves.

Dans toutes les fratries, il arrive qu’il y ait des disputes et des jalousies qui fort heureusement n’aboutissent pas au meurtre. On peut déprécier tel ou tel trait de caractère ou ne pas partager les mêmes idées, rien ne justifie une telle extrémité. Cependant, dans notre récit, ce qui finalement attise la haine jusqu’à conduire les fils de Jacob au meurtre de Joseph, c’est le refus d’entendre le message prophétique.

Ces hommes auraient pu simplement rester sceptiques et ignorer les paroles de Joseph. Il n’en est rien. Le « prophète » disparaitra en même temps que ses « prophéties ». Ce seul motif pèsera plus que tout autre chose dans la balance de leur jugement.

Les frères n’ont aucune indulgence pour Joseph, son jeune âge ou son caractère benêt. Leur refus d’accepter un quelconque crédit prophétique aux rêves de leur petit frère met en lumière très simplement leur refus de suivre Dieu dans l’Alliance de leurs pères.

Pour nous qui, lisant les chapitres qui suivent, mesurons la profondeur du fossé qu’il faudra combler pour amener ces hommes à la repentance et une téchouva sincère, cela bien des années plus tard, la dimension prophétique et messianique du récit se dessine peu à peu avec une amplitude sans précédent.

En effet, pour les rabbins, Joseph, prototype du Messie qui vient, reflète le Messie qui souffrira de la haine et du rejet de ses frères. C’est pourquoi les rabbins l’ont désigné comme le Messie souffrant. L’interprétation de cette souffrance que d’autres feront plus tard est une autre histoire. La cohérence du récit montre cependant que la souffrance de Joseph vient avant tout de ses propres frères.

Il n’est pas un mystère que Yéchoua’, lors de sa venue sur la terre, a connu un rejet semblable, une haine profonde de la part d’une partie de son peuple. Il finira par mourir jugé par les principaux sacrificateurs de son temps pour sa qualité de prophète au message qui dérange, un message qui mettait en lumière leur rejet de l’Alliance de Dieu.

Pour l’heure, les frères de Joseph échafaudent un plan qui dépasse la simple élimination du faiseur de rêves. Ils vont également devoir tromper leur père et faire passer la mort de Joseph comme le fruit d’un accident. Ce qui, implicitement, est une manière de désigner Dieu comme responsable de la disparition prématurée de Joseph, celui sur qui Jacob avait placé tous ses espoirs. Ainsi, ils ne portent pas uniquement atteinte à la vie de Joseph, mais ils mentent à leur père d’une manière épouvantable.

Dans notre perspective prophétique, le complot ourdi par la fratrie porte atteinte au Messie, mais également à Dieu lui-même, le Père.

Au point où nous en sommes, bien des commentateurs juifs tentent d’expliquer le geste des frères de Joseph. Cherchent-ils à atténuer leur culpabilité ? Leur embarras est manifeste. Rachi et quelques autres estiment que Joseph est puni pour ses médisances et ses calomnies racontées sur ses frères.

En réalité, comme évoquée plus haut aux versets 18 à 20, rien ne permet de relier le complot criminel des fils de Jacob à la médisance de celui-ci. C’est plutôt le refus de recevoir le message prophétique des rêves du jeune homme qui est la première source de leur inclinaison au mal.

On imagine mal le crime prémédité des frères comme une punition infligée par Dieu à Joseph, ou encore une conséquence fâcheuse de ses égarements.

La dimension prophétique du récit me semble primer sur une quelconque lecture éthique dans ce crime, une lecture qui, par ailleurs, ne peut s’écarter de l’évidence du texte.

Malgré l’épouvantable projet criminel des fils de Jacob, l’auteur du livre de Béréchit fait une confiance absolue en la souveraineté divine. Les histoires qui précèdent, avec Abraham et Isaac, tendent à confirmer, s’il en était besoin, que les « échecs » des hommes ou leurs égarements n’empêchent pas Dieu de mener à bien son projet de rédemption de l’humanité et de l’annoncer d’une manière qui nous dépasse au travers d’une histoire que nous n’aurions pu inventer.

Le patriarche Jacob connaissait ses échecs et se demandait vraiment comment Dieu allait pouvoir l’en sortir. Quelque temps auparavant, il n’avait pas su arrêter le crime de Siméon et Lévi sur le clan de Sichem[2]. Craignait-il de voir ses fils poursuivre la voie criminelle dont il avait été le témoin malgré lui ?

L’éducation de ses fils lui échappe en grande partie. Il s’attache alors à transmettre sa foi au plus jeune, le plus accessible peut-être à l’Alliance de ses pères.

Ainsi donc, Jacob place tous ses espoirs en Joseph. On peut donc imaginer le coup porté à Jacob lorsqu’il apprend la mortde son fils préféré. Par-delà l’émotion toute légitime, il faudra un pas de foi extraordinaire pour continuer à percevoir le plan prophétique de Dieu dans cette histoire.

On suppose avec raison que le récit est écrit après le déroulement des faits qu’il narre. Aussi est-il improbable que l’auteur désigne dans le crime des fils de Jacob, d’une manière implicite ou non, un jugement contre Joseph. Celui-ci nous livre même l’une des clés de lecture de notre récit prophétique en Genèse 45. 5 :

5 Et maintenant, ne vous affligez point, ne soyez pas irrités contre vous-mêmes de m’avoir vendu pour ce pays ; car c’est pour le salut que le Seigneur m’y a envoyé avant vous.

Cela étant, la dimension messianique du texte dépasse le récit lui-même comme on va le voir.

21 Ruben l’entendit et voulut le sauver de leurs mains ; il se dit : « N’attentons point à sa vie. » 22 Ruben leur dit donc : « Ne versez point le sang ! Jetez-le dans cette citerne qui est dans le désert, mais ne portez point la main sur lui. » C’était pour le sauver de leurs mains et le ramener à son père. 23 En effet, lorsque Joseph fut arrivé près de ses frères ils le dépouillèrent de sa robe, de la tunique à rayures dont il était vêtu ; 24 et ils le saisirent et ils le jetèrent dans la citerne. Cette citerne était vide et sans eau.

La démarche de Ruben pour sauver Joseph, comme celle de Juda un peu plus loin au verset 26, semblent louables, mais ne vont pas dans le même sens.

Ruben a certes le souci de Joseph. Peut-être a-t-il en effet une pensée pour son père dont il craint que l’événement ne cause la perte.

De son côté, Juda a une visée plus mercantile en se proposant de vendre Joseph à des étrangers. Pire, il suppose à peine que le pays dans lequel serait emmené Joseph est immoral et réprouvé de Dieu.

Au bout du compte, il semble difficile de comprendre le sens de ces tentatives et réactions de « compassion » de la part de Ruben et Juda. Les commentateurs ne sont pas pressés de répondre à ce sujet.

Ce qui est clair, c’est que durant le trajet qui sépare encore Joseph de ses frères, le complot ne fait pas l’unanimité. La haine et les sentiments hostiles des uns et des autres ne sont pas uniformes. On peut supposer le temps trop court pour décider du sort de leur jeune frère.

Le drame finalement tient en deux actes symboliques et prophétiques.

… ils le dépouillèrent de sa robe, de la tunique à rayures dont il était vêtu…

Comme nous l’avons déjà évoqué, la robe à rayures dont était vêtu Joseph est symbole de royauté. Le fait de l’en dépouiller n’a de sens que sur le plan prophétique. En effet, on imagine mal l’un des frères se revêtir de cette robe sans se faire remarquer et sans devoir s’en expliquer.

La robe de Joseph est en revanche l’instrument par lequel les frères affirment prophétiquement leur refus de se soumettre au prince Messie qui vient.

… ils le saisirent et ils le jetèrent dans la citerne.

À ce stade, les fils de Jacob sont peut-être encore indécis à propos de Joseph. En attendant de se mettre d’accord, ils le jettent dans un trou. À cette époque, les citernes étaient des réservoirs creusés dans le sol. L’eau accumulée durant la saison des pluies permettait d’abreuver les troupeaux en été.

Le détail de cet enfermement aurait pu passer comme anecdotique. Or il a une portée prophétique que l’on soupçonne à peine.

Selon certains commentaires rabbiniques anciens, Joseph passe trois jours et trois nuits avant d’être vendu aux caravaniers.

Les chiffres ici peuvent paraître opportunistes, mais dans la bouche des commentateurs de la Torah, tout à un sens plus ou moins voilé. Ces commentaires pour la plupart datent de bien avant l’avènement de Yéchoua’.

Partout où l’expression « trois jours », voire « trois nuits », est précisée, le sens prophétique du passage est rarement mis en doute.

Parmi les passages qui évoquent la même indication, je relèverai le récit de l’Akédah d’Isaac (Genèse 22. 4.), un texte dont la portée prophétique est indiscutable.

4 Le troisième jour, Abraham, levant les yeux, aperçut l’endroit dans le lointain.

Abraham aperçoit le lieu du sacrifice au bout de trois jours. Or l’Akédah est admise par les commentateurs juifs comme un signe prophétique majeur.

Jonas, lui-même, passera trois jours et trois nuits dans le ventre du grand poisson (Jonas 2. 1.). Or son aventure dans les entrailles du poisson est désignée comme un signe par Yéchoua’ en relation avec son avènement et sa mission (Matthieu 12. 39-40)[3].

On peut donc estimer que le séjour de Joseph dans les profondeurs de la citerne (a priori sous terre), représente, en quelque sorte, une « mort » symbolique qui annonce la mort du Messie à venir, le Messie souffrant.

25 Comme ils étaient assis pour prendre leur repas, ils levèrent les yeux et virent une caravane d’Ismaélites, laquelle venait de Galaad ; leurs chameaux étaient chargés d’aromates, de baume et de lotus qu’ils allaient transporter en Égypte. 26 Juda dit à ses frères : « Quel avantage, si nous tuons notre frère et si nous scellons sa mort ? 27 Venez, vendons-le aux Ismaélites et que notre main ne soit pas sur lui, car il est notre frère, notre chair ! » Et ses frères consentirent.

28 Or, plusieurs marchands madianites vinrent à passer, qui tirèrent et firent remonter Joseph de la citerne, puis le vendirent aux Ismaélites pour vingt pièces d’argent. Ceux-ci emmenèrent Joseph en Égypte.

Je ne reviendrai pas sur l’opportunisme de Juda qui voit en son frère une occasion de se faire un peu d’argent. Encore qu’en l’occurrence, l’affaire ne sera pas si juteuse. En effet, Joseph est vendu au prix de 20 pièces d’argent, un montant assez dérisoire. Un esclave valait davantage. Faut-il en conclure que les frères n’ont pas réussi à en obtenir le prix qu’ils en voulaient ? Joseph semblait pourtant un jeune homme en bonne santé.

À moins qu’en définitive, la transaction ait elle aussi une signification prophétique. Cette somme de 20 pièces correspond à l’équivalent de 5 chekalim payés par chacun des 10 frères de Joseph (soit 2 dinarim pour chacun), le prix du rachat du premier né de toute famille israélite, selon la Loi de Moïse.

Si nous considérons l’origine du rachat du premier né de chaque famille israélite, au moment de la Pâque, il peut être admis que le prix indiqué est celui d’une rançon pour une vie.

Le montant donné ici de 20 pièces d’argent peut symboliquement correspondre au prix payé pour racheter tous les frères coupables de livrer Joseph à la mort.

Pour le Houmach, c’est la faute des frères qui est ici indirectement rappelée et soulignée plus tard au travers du tribut payé pour racheter les premiers-nés lors de la Pâque.

 29 Ruben revint à la citerne et voyant que Joseph n’y était plus, il déchira ses vêtements, 30 retourna vers ses frères et dit : « L’enfant n’y est plus et moi, où irai je ? » 31 Ils prirent la robe de Joseph, égorgèrent un chevreau et trempèrent la robe dans son sang ;

Ruben, quoiqu’ayant eu l’intention de tirer Joseph de ce piège, participe finalement au mensonge abominable de ses frères.

Mais même en ces circonstances, les commentateurs juifs restent embarrassés et préfèrent voir dans ce drame une action divine souveraine dans laquelle les frères de Joseph sont des pions entre les mains de Dieu.

Cela étant, tous ne sont pas unanimes pour relativiser la culpabilité de la fratrie. Même si l’issue de l’histoire est positive, la faute des patriarches est réelle et sa portée prophétique indiscutable.

Le bouc ou le chevreau sacrifié par les frères de Joseph pour en imbiber la tunique multicolore est en quelque sorte, pour le Midrash, l’enseignement rabbinique, une réminiscence du sacrifice d’Isaac. Le bouc se substitue à Joseph, comme dans le cas d’Isaac.

Par ailleurs, pour les rabbins, ce même sacrifice de substitution se retrouve dans la Loi elle-même et le Michcan avec l’offrande quotidienne d’un agneau en sacrifice d’expiation.

Il devient évident que l’archétype du Messie incarné par Joseph sous-entend que le prince Messie doit mourir comme le bouc ou l’agneau en sacrifice d’expiation pour les péchés.

 32 puis ils envoyèrent cette tunique à rayures, qu’on apporta à leur père en disant : « Voici ce que nous avons trouvé ; examine si c’est la tunique de ton fils ou non. » 33 II la reconnut et s’écria : « La tunique de mon fils ! Une bête féroce l’a dévoré ! Joseph, Joseph a été mis en pièces ! »

On ose à peine imaginer la manière dont les frères vont annoncer à leur père la mort de son fils. Envoient-ils tout exprès un serviteur faire la triste besogne ? En envoyant l’un d’eux à Hébron, craignent-ils que leur père les soupçonne d’être responsables de sa disparition ?

On ne sait pas vraiment si ce sont les fils de Jacob ou Jacob lui-même qui suggère que Joseph ait été dévoré par une bête féroce. Toujours est-il que le mensonge est monstrueux et va dès cet instant travailler la conscience de chacun des frères de Joseph jusqu’à leur revirement complet, mais bien plus tard.

Sur le plan prophétique et messianique, nous comprenons bien que le Messie est déclaré mort, puis vivant, sorti de la terre au troisième jour et prêt à être révélé à ses frères.

Les commentateurs juifs évoquent une curieuse tradition qui aurait imposé aux frères un serment (Hérèm, anathème), y compris à Joseph, pour ne pas révéler à leur père Jacob la trahison et la vérité au sujet de Joseph.

Se peut-il qu’aujourd’hui encore, la vérité au sujet du prince Messie — Yéchoua’ — soit connue et que l’on se garde de la révéler ?

Selon la tradition, Jacob apprend la « mort » de son fils Joseph le 10 du mois de Tichri, ce qui correspond dans le calendrier hébraïque à Yom Kippour, c’est-à-dire au jour des expiations. Ce jour-là, le souverain sacrificateur entrait dans le lieu Très-Saint pour offrir, en ce jour unique, le sang des boucs pour l’expiation de tout le peuple.

Cette référence midrashique renforce encore plus la valeur du sacrifice substitutif et expiatoire de Joseph, précurseur du Messie à venir.

 34 Et Jacob déchira ses vêtements et il mit un cilice sur ses reins et il porta longtemps le deuil de son fils. 35 Tous ses fils et toutes ses filles se mirent en devoir de le consoler ; mais il refusa toute consolation et dit : « Non ! Je rejoindrai, en pleurant, mon fils dans la tombe ! » Et son père continua de le pleurer. 

La mort annoncée de Joseph est terrible pour Jacob. Il ne s’en remettra pas avant de le revoir — bien des années après et quelques chapitres plus loin. Le deuil de Jacob se prolonge au-delà de la norme habituelle.

Se peut-il que ce deuil prolongé de Jacob illustre le deuil de Dieu lui-même dans l’attente de la repentance complète de tout le peuple d’Israël quand il reconnaitra son prince Messie ?

Que se passe-t-il dans le cœur de Jacob tout au long de ces années ?… Songeait-il à la manière dont Dieu allait pouvoir poursuivre son Alliance, tandis qu’il avait lui-même tant espéré avec Joseph ?… Difficile à dire.

D’une certaine façon, ce deuil reflète l’amour extrême que Jacob portait à son fils — image de l’amour de Dieu pour son Messie qui donnera sa vie en rançon pour le peuple.

Dans toute cette histoire, le Midrash se force, d’une manière ou d’une autre, à voir dans le plan machiavélique des frères de Joseph une intention toute relative de nuire au Messie annoncé. Pour les commentateurs, Dieu est souverain et connait chaque moment de la vie de Joseph sur le chemin de l’Égypte. Les frères sont en quelque sorte des instruments malgré eux dans le plan divin.

On peut — sur le plan prophétique et messianique — effectivement affirmer que Dieu reste celui qui maîtrise le moindre détail de ce qui arrive au jeune garçon enfermé dans la citerne. Cela n’enlève en rien la culpabilité des frères et les choix qu’ils feront pour vendre leur frère et tromper leur père.

Nous ne sommes qu’au début de cette aventure messianique avec Joseph et quelle joie de savoir Dieu maître de ce récit, de ce qu’il annonce et révèle à propos du Messie qui nous a rachetés !

La vie de Yéchoua’ que l’on retrouve dans les Évangiles a étrangement des accents qui font écho à la vie du patriarche Joseph. On peut en avoir encore des doutes ou au contraire se construire doucement des convictions.

Ce qui était caché devait un jour être révélé et ce qui était annoncé devait un jour s’accomplir.

Notre cheminement à la recherche de « miettes » est une invitation permanente à faire la rencontre de celui qui les a semées.

Ami lecteur, ne restez pas « spectateur » de ce qui se dévoile peut-être à vos yeux. Le Messie n’est pas resté dans une « citerne ». Il n’est pas davantage resté sur la croix ou dans le tombeau. Il est vivant aujourd’hui et désir vous rencontrer.

[1] Tanakh est un acronyme désignant la Torah, les Névîîm (les prophètes), les kétouvim (les écrits).

[2] Genèse 34.

[3] Voir également : Jean 2. 19 ; Matth. 26. 61.

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ATHIA Guy

Directeur des publications du Berger d’Israël.

Vice-président de Beit Sar Shalom.

Conférencier et enseignant.

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